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Le questionnaire comporte un Ainsi, pour certains pays ou ré- par une situation d’addiction
socle commun (nombre de vic- gions, une seule forme d’exploi- détectée par l’association pour
times, forme d’exploitation, tation prédomine. C’est notam- 19 % des victimes. Les princi-
genre, âge et pays d’origine) et ment le cas du Nigéria où la paux exploiteurs sont des in-
un socle facultatif approfondis- quasi-totalité des victimes sont connus (38 %), cependant, 6 %
sant les connaissances sur les exploitées sexuellement. Ces sont le conjoint de la victime
profils des victimes, les condi- réseaux de criminalité organisée (phénomène des loverboys ).
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tions d’exploitation ou encore sont bien identifiés par les auto- L’enquête a par ailleurs confir-
les démarches entreprises pour rités et les associations. À mé l’émergence du phénomène
les associations. Pour chaque l’inverse, pour les régions d’Eu- de l’exploitation sexuelle de
question, les parts sont calcu- rope de l’Est et du Sud, jeunes filles françaises mi-
lées à partir du nombre de vic- d’Afrique du Nord, d’Afrique de neures ou jeunes majeures (7 %
times suivies par les associa- l’Ouest (hors Nigéria) ou encore des victimes). Ces dernières gé-
tions répondantes . d’Asie, les formes d’exploitation néralement en rupture familiale
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sont plus diverses avec notam-
Pour rappel, en France, seules ment une part plus importante et/ou scolaire entrent dans un
les autorités compétentes peu- de victimes d’exploitation par le système d’exploitation dont
vent identifier une victime de travail. Par ailleurs, les victimes elles ne peuvent plus sortir.
traite des êtres humains. Les de mendicité forcée sont quasi- ii. Les victimes d’exploita-
personnes qui sont suivies par ment toutes originaires d’Eu- tion par le travail
les associations n’ont pas toutes rope de l’Est et du Sud.
décidé d’engager des démarches L’exploitation par le travail con-
auprès de ces autorités. Les per- Plus spécifiquement, cinq pro- cerne 510 personnes suivies par
sonnes comptabilisées comme fils de victimes ressortent des 30 associations, soit 17 % des
victimes de traite dans cette résultats de l’enquête au regard victimes en 2018. Deux profils
partie sont donc celles pour les- des formes d’exploitation. d’exploitation par le travail se
quelles les associations esti- i. Les victimes d’exploitation distinguent : les victimes d’ex-
ment, au regard de critères qui sexuelle ploitation domestique (233 vic-
leur sont propres, qu’elles sont times – 8 %) et les victimes d’ex-
ou étaient en situation de traite. Ces victimes représentent 74% ploitation par le travail hors do-
mestique (277 victimes – 9 %).
de l’ensemble (soit 2 160 vic-
B. Les résultats de l’enquête times suivies par 49 associa- Ces dernières concernent majo-
tions). Cette surreprésentation ritairement des hommes (74 %)
Pour la troisième édition de doit être nuancée pour deux rai- et 77 % sont majeures. Ces vic-
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cette enquête, 53 associations sons : d’une part, le nombre im- times d’exploitation sont, pour
près de la moitié d’entre elles,
ont transmis des informations portant de victimes suivies par
sur 2 918 personnes victimes de les associations spécialisées et originaires d’Asie du Sud-Est, et
traite des êtres humains, que accompagnant des personnes en particulier du Vietnam (46
%). Plus du tiers sont originaires
l’accompagnement ait débuté en prostituées et d’autre part, les
2018 ou non. Ce questionnaire a victimes de cette forme d’ex- d’Afrique du Nord et de l’Ouest
mis en évidence le caractère ploitation sont plus « visibles » (36 %). Leur transfert en France
a été organisé par l’exploiteur
mondial du phénomène (79 et plus accessibles. Ces der-
pays d’origine identifiés) ainsi nières sont principalement des ou le réseau pour 59 % des vic-
que la forte emprise de l’exploi- femmes (93 %) et 88% sont ma- times. Cela diffère des victimes
teur passant par le transfert ou jeures. La majorité des victimes des autres formes d’exploitation
l’hébergement de la victime. Par sont originaires du Nigéria (65% pour lesquelles le transfert vers
le lieu d’exploitation est quasi
ailleurs, cette étude a permis à soit 1 404 victimes). Leur vulné-
la fois de distinguer des profils rabilité peut être accentuée par toujours organisé par l’exploi-
selon les formes d’exploitation la maternité, 25% des femmes teur ou le réseau.
mais également certaines spéci- ont connu une grossesse au
Les victimes d’exploitation do-
ficités selon les régions d’ori- cours de leur exploitation, et mestique sont dans leur quasi-
gine des victimes.
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N 30– Juillet 2020
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