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Or, ainsi que le souligne le rap- sures de prévention, sont assor- À l’absence de définition de con-
port parlementaire de MM. Ma- ties d’une sanction pénale en cas flits d’intérêts, telle que constatée
tras et Marleix, l’effectivité des de méconnaissance (un an d’em- en 2011 a succédé une définition
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moyens dont dispose l’adminis- prisonnement et 15 000 euros arrêtée par le Parlement à l’article
tration pour assurer le respect d’amende – art. 26 de la loi du 2 de la loi du 11 octobre 2013, et
des obligations déontologiques, 11 octobre 2013). Le transfert reprise à l’identique en 2016 :
y compris pour sanctionner les d’un tel pouvoir à l’autorité is- « constitue un conflit d'intérêts
comportements fautifs, est es- sue de la fusion de la HATVP et toute situation d'interférence entre
sentielle pour conforter une ré- de la commission de déontologie un intérêt public et des intérêts
elle culture déontologique. Si les de la fonction publique, telle publics ou privés qui est de nature
lois de 2013 et 2016 ont procédé que recommandée par ce rap- à influencer ou à paraître influen-
à un rééquilibrage nécessaire port parlementaire, pourrait cer l'exercice indépendant, impar-
entre prévention et répression, avoir pour effet d’en élargir le tial et objectif d'une fonction ».
le volet répressif ne peut être champ d’application et d’en ac- Cette définition, qui est conforme
laissé dans l’oubli, tant sa réalité croître ainsi la portée. à celle proposée par la commis-
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était restreinte antérieurement. Cette évolution ne doit cependant sion Jospin a été conçue pour
En 2016, seules 100 sanctions pas conduire à remettre en cause être large. Elle est néanmoins
concernaient des questions liées le rééquilibrage opéré depuis 2013 moins précise que celle proposée
à la probité, l’intégrité et les entre prévention et répression, par la commission Sauvé, et dif-
conflits d’intérêts. fère notamment quant à la possi-
mais seulement à conforter le vo-
let répressif à des fins dissuasives bilité de qualifier un tel conflit
Le rôle du chef de service est et d’exemplarité. En effet, « la dé- entre deux intérêts publics.
pourtant essentiel en matière de ontologie n’est pas une "autoroute"
déontologie, comme le rappelle pour la répression disciplinaire Or, sans évoquer ici tout le con-
l’article 25 de la loi du 13 juillet mais un mode d’emploi s’inscri- tenu de cette définition, notam-
1983. Cette fonction se traduit à vant dans une démarche préven- ment s’agissant de la question
la fois par le rôle de conseil qui tive » . Mais, nonobstant les cri- de l’apparence, son caractère
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lui est dévolu dans le cadre d’un tiques philosophiques qui peuvent très ouvert n’est pas sans inci-
dialogue déontologique avec les entourer l’idée de prévention (M. dence sur l’action des agents
agents placés sous son autorité, Foucault, Surveiller et punir, Paris, publics, notamment lorsque se
mais également par la répres- Gallimard, 1975), une politique de pose la question du risque
sion des manquements à travers « tolérance zéro » participe pleine- d’interférence entre deux inté-
l’exercice de ses pouvoirs de ment d’une telle logique, dès lors rêts publics, question qui peut
sanction. L’effectivité des con- que tous les acteurs concernés se poser régulièrement. Si cette
trôles, comme le souligne le rap- sont informés des risques encou- règle a vocation à clarifier en
port de MM. Matras et Marleix, rus. C’est en ce sens que l’Agence particulier les cas de cumul, no-
est indispensable pour conférer française anticorruption (AFA) re- tamment, dans sa conception
sa réelle portée au cadre répres- commande l’application réelle de initiale, les situations de cumul
sif mis en place. Au demeurant, sanctions disciplinaires dissua- de mandats, mais aussi les cu-
le transfert d’une partie des sives, un engagement public sur la muls d’activités relevant du
pouvoirs de sanction vers une volonté de lutter contre la corrup- champ de l’article 25 septies du
autorité extérieure, la HATVP, tion, la valorisation des comporte- statut général (ce qui s’induit de
par la loi du 11 octobre 2013, a ments éthiques et un rappel de l’article 5 du décret du 27 jan-
rendu son pouvoir de contrôle ces règles dans le cadre d’un code vier 2017 relatif à l'exercice d'ac-
d’autant plus efficace comme de conduite . tivités privées par des agents
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moyen de prévention que les publics et certains agents con-
injonctions que la Haute autorité Ces pratiques vertueuses de- tractuels de droit privé ayant
peut être amenée à prononcer en vraient, au demeurant, venir cessé leurs fonctions, aux cu-
cas d’absence de déclaration soutenir l’action des acteurs pu- muls d'activités et à la commis-
d’intérêts ou de situation patri- blics eux-mêmes. sion de déontologie de la fonction
moniale ou lorsque l’examen publique), elle n’en présente pas
d’une déclaration d’intérêts ré- B. La prévention des conflits moins le risque de déstabiliser
vèle un risque de conflit d’inté- d’intérêts au bénéfice de l’action publique notamment
rêts appelant la prise de me- l’action publique dans l’exercice de missions de
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N 25– Décembre 2018
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